Test: Recherche IRSST 2

Par Karolane Landry

10 mai 2025

Photo : Collection personnelle

Au cours des dernières années, plusieurs accidents dans les milieux de travail ont été causés par des facultés affaiblies par la drogue ou l’alcool. En effet, la consommation d’alcool, même en petite quantité, réduit l’état de vigilance, les réflexes et la capacité d’attention des travailleuses et travailleurs. Le directeur général d’Alco Prévention Canada, un distributeur canadien d’éthylomètres, d’éthylotests, d’alcootests et de tests de dépistage de drogues, Stéphane Maurais, nous a parlé de ce qui l’a motivé à s’intéresser à ces questions et de sa vision de l’innovation en santé et sécurité du travail (SST).

Monsieur Maurais, pourquoi avez-vous fondé une entreprise liée à la prévention?

J’ai fondé mon entreprise en 1989, alors que j’étudiais à l’université. Quand je sortais avec des amis, je voyais trop de gens conduire après avoir pris plusieurs consommations. Je trouvais ça difficile, voire impossible, de les convaincre de ne pas prendre le volant sans avoir d’outil pour mesurer leur alcoolémie. On connaît la limite, mais souvent, on ne sait pas à quel point on est intoxiqué avant de se faire prendre par les policiers. On a donc commencé à travailler en collaboration avec des restaurants et des bars, et au début des années 2000, la Société des alcools du Québec nous a donné l’opportunité de vendre nos alcootests à usage unique dans toutes ses succursales.

Quand vous êtes-vous intéressé à la problématique de l’alcool en milieu de travail?

Au fil des années, on a commencé à travailler avec des gestionnaires d’entreprises qui voulaient s’assurer que leurs employés n’étaient pas en état d’ébriété au travail. D’ailleurs, les statistiques démontrent que 15 % des gens se présenteraient sur leur lieu de travail avec les facultés affaiblies par la drogue, l’alcool ou les médicaments. Cela contribuerait à environ 20 % des accidents au sein des entreprises. C’est énorme, et nous recevons d’ailleurs beaucoup de demandes pour faire des tests en entreprise et pour former les travailleuses et travailleurs et les gestionnaires en lien avec leurs responsabilités. Je considère que nous sommes là pour proposer une solution concrète pour prévenir et pour sécuriser les lieux. Prenons l’exemple de quelqu’un qui consommerait de l’alcool sur l’heure du dîner et qui reviendrait ensuite conduire un chariot élévateur : on sait que beaucoup de collègues seraient mal à l’aise avec ce type de situation et souhaiteraient que les gestionnaires interviennent davantage.

Qu’est-ce qui distingue les produits que vous distribuez en entreprise?

Il existe plusieurs produits pour des marchés distincts, mais en entreprise, on utilise des appareils différents de ceux conçus pour un usage personnel. Ce sont des produits plus robustes, avec des capteurs plus épais et des fonctions supplémentaires. Quand on fait un test avec une travailleuse ou un travailleur, l’appareil imprime le résultat, avec la date et le nom.

Récemment, on a aussi lancé un dispositif encore moins invasif : les gens doivent simplement mettre la main sur l’appareil, et on est ainsi capables, grâce à la technologie transdermique, de savoir si la personne a de l’alcool dans son organisme. Si c’est le cas, l’appareil devient rouge. Les gestionnaires peuvent donc réagir rapidement pour sécuriser le milieu de travail.

Pourquoi avoir créé de tels outils?

Je suis un adepte des outils pour prévenir les accidents. Prenons en exemple une entreprise qui possède un parc de camions. Il peut arriver qu’une travailleuse ou un travailleur consomme de l’alcool et se couche vers minuit, alors qu’elle ou il a, disons, le double de la limite légale d’alcoolémie. Comme le corps élimine seulement 15 milligrammes d’alcool à l’heure, ça peut prendre 11 heures avant que l’alcool soit complètement expulsé de son système. Cela signifie que le lendemain, vers 7 ou 8 h, la personne se rendra au travail, prête à conduire, tandis qu’elle aura encore de l’alcool dans le sang.

La solution que nous proposons est simple : la chauffeuse ou le chauffeur de camion rentre au travail le matin et passe un test. Si le dispositif clignote vert, il peut partir sur la route. Ensuite, lorsqu’il ramène le véhicule à la fin de son quart de travail, il refait le test afin que l’employeur puisse s’assurer qu’il n’a pas consommé d’alcool durant la journée.

Quelles sont les conséquences concrètes de la consommation d’alcool en milieu de travail?

Pour permettre aux travailleuses et travailleurs de s’en faire une idée, on installe des kiosques dans les entreprises et on propose aux gens de mettre des lunettes qui simulent l’état d’ébriété à 0,05 %, 0,08 % et 0,16 %. Ensuite, on tente de leur faire accomplir des tâches aussi simples que rentrer une clé dans une serrure, marcher sur une ligne droite ou contourner des obstacles. Les travailleurs prennent ainsi conscience qu’en état d’ébriété, faire des choses anodines est très ardu. Or, comment pourrait-il être possible de conduire un chariot élévateur ou de travailler sur des chaînes de production, par exemple, sans nuire à sa santé et à sa sécurité ainsi qu’à celles des autres?

Que devrait faire une organisation qui désire utiliser des outils de prévention en lien avec l’alcool dans son milieu de travail?

D’abord, on s’assure que l’entreprise possède une politique à l’égard des drogues et de l’alcool en milieu de travail, et que celle-ci a été communiquée et comprise par toutes les parties. Ensuite, on suggère d’organiser une journée SST, lors de laquelle nous serons sur place pendant quelques heures pour faire des activités de prévention et de sensibilisation. On désire transmettre le message d’une façon ludique par le biais de questionnaires et de jeux. Au lieu de dire aux travailleuses et travailleurs qu’ils n’ont pas le droit de consommer de l’alcool, la première étape est de leur faire prendre conscience des risques qui y sont reliés. Ensuite, on forme les gestionnaires, qui sont souvent mal à l’aise d’intervenir dans de telles situations. C’est important de former toutes les parties sur leurs responsabilités.

Finalement, on remet à l’organisation des tests de dépistage de drogue et d’alcool, et on explique leur fonctionnement. Il faut faire les choses selon les règles, car au Québec, on ne peut pas simplement donner un test de dépistage à quelqu’un sans motif valable si la sécurité n’est pas compromise. D’ailleurs, la travailleuse ou le travailleur doit pouvoir choisir parmi un lot de six tests qui lui sont présentés.

Quelle est la réaction du personnel lorsqu’il y a implantation de tests de dépistage en entreprise?

Généralement, les membres des équipes sont très ouverts, car ils veulent travailler dans un milieu sain et exempt de risques. C’est en discutant avec les employeurs et en utilisant les nouvelles technologies qu’on peut permettre de rendre les milieux de travail plus sécuritaires.

« Au lieu de dire aux travailleuses et travailleurs qu’ils n’ont pas le droit de consommer de l’alcool, la première étape est de leur faire prendre conscience des risques qui y sont reliés. »

– Stéphane Maurais, directeur général d’Alco Prévention Canada

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