Le relevage des pompes à béton : une tâche méticuleuse
Par Karolane Landry
14 mai 2024
Photo : iStock.com/SimplyCreativePhotography
Plusieurs incidents de renversement de pompes à béton ou d’équipement avec un mât, comme une grue mobile, surviennent sur les chantiers de construction. Lorsque ces appareils se renversent sur le côté, une procédure de relevage complexe doit être réalisée. Dès lors, de mauvaises méthodes de travail peuvent conduire à de graves accidents. Une procédure de travail bien établie permet donc d’effectuer ces manœuvres de relevage de façon sécuritaire et efficace. Josée Ouellet, ingénieure experte en prévention à la CNESST, nous dit tout sur le sujet.
Tout d’abord, il faut savoir qu’une pompe à béton possède deux parties distinctes : le camion muni d’une pompe, que l’on nomme aussi « porteur », et les tuyaux de transport, reliés à la pompe, qui permettent d’acheminer le béton à l’endroit voulu. « Si l’on veut bétonner au cinquième ou au sixième étage, le mât de distribution qui supporte les tuyaux de transport sera déployé pour faire monter le béton, explique d’emblée Josée Ouellet. La pompe, qui est située sur le camion, poussera le béton dans ces tuyaux. »
Une procédure rigoureuse
« Lorsqu’un camion routier est impliqué dans un accident sur l’autoroute et se retrouve sur le côté, il doit être remis sur ses roues de façon méticuleuse, poursuit l’experte. C’est un peu plus complexe lors du renversement d’une pompe à béton ou d’une grue mobile. Le porteur doit être remis sur ses roues avec une structure plus ou moins déployée qui y est rattachée. Toutefois, cela ne se fait pas de n’importe quelle façon et il ne s’agit pas d’une manœuvre simple. » En effet, il faut alors établir comment tenir l’équipement, l’attacher et le retourner. Puisque l’équipement comporte plusieurs parties, la procédure est complexe.
Ainsi, lorsqu’un renversement survient, l’employeur ou le maître d’œuvre du chantier ne doit pas tenter de relever l’équipement sans avoir planifié la manœuvre. La première étape est de contacter une ingénieure ou un ingénieur qui pourra élaborer un plan de levage afin d’en préciser les étapes et la séquence des manœuvres. Après avoir effectué une analyse de la situation, elle ou il pourra déterminer les équipements requis pour procéder au relevage et les personnes compétentes pour le faire. « Comme c’est le cas pour n’importe quel accident de travail, il importe d’abord d’évaluer la situation, précise Mme Ouellet. Faut-il évacuer le chantier, le bâtiment ou les zones de travail pour relever l’équipement? Quel matériel est nécessaire pour effectuer le relevage? De quel espace a-t-on besoin? Quelles sont les ressources qui doivent être mobilisées (comme la fermeture de rue ou la mise en place de panneaux de signalisation)? Voilà des questions qui méritent une attention particulière. »
Avec le plan de levage, l’employeur ou le maître d’œuvre pourra alors élaborer une procédure de travail afin de mettre en place toutes les mesures jugées nécessaires au bon déroulement des travaux. Dans la majorité des situations, au moins deux grues mobiles sont utilisées en tandem pour effectuer le relevage de l’équipement et soutenir les deux parties de la pompe à béton ou de la grue mobile, soit le porteur et le mât. Si tel est le cas, la réglementation sur les appareils de levage s’applique. Les personnes qui manipulent ces équipements doivent donc être adéquatement formées pour les utiliser et faire de telles manœuvres.
Pendant toute la durée du relevage de l’équipement, une personne responsable dirige et coordonne les travaux. Elle s’assure également que toutes les personnes concernées dans cette manœuvre reçoivent les instructions relatives à la méthode de travail et à la séquence des travaux.
Une manœuvre qui n’est pas sans risque
Lors de la manœuvre de relevage d’un équipement avec un mât, chaque partie doit être retenue. « Si l’on ne retient pas le mât de distribution lorsqu’on remet la pompe à béton sur ses roues, celle-ci peut créer un effet de fouettement et faire renverser l’équipement de l’autre côté, explique Josée Ouellet. Cela pourrait alors engendrer un autre accident de travail, avec tous les dangers qui s’y rattachent. »
Des risques de déchirement au niveau des ancrages où sont attachés les câbles de relevage sur l’équipement existent également lors du relèvement. Ainsi, si un câble en acier est utilisé par la grue mobile et que la bonne capacité de levage n’a pas été prévue et respectée, la force exercée par le câble en traction peut briser ou déchirer l’ancrage. Par conséquent, des morceaux pourraient être projetés dans les airs et tomber sur les travailleuses et travailleurs. « La CNESST a enquêté à plusieurs reprises sur des décès survenus lors de manœuvres de traction pendant lesquelles des pièces d’équipements brisées ont heurté des travailleurs à la tête », ajoute Mme Ouellet.
Une procédure de relevage de ce type d’équipement comporte donc plusieurs risques. Toutefois, si elle est planifiée et réalisée adéquatement, la sécurité des travailleuses et travailleurs n’est pas compromise.
Bon à savoir!
La norme CAS Z150 – Code de sécurité pour les grues mobiles mentionne toutes les précautions à prendre pour effectuer un levage en tandem, notamment l’identification du personnel requis, les moyens de communication, les mesures de contrôle de la circulation, l’ordre détaillé des travaux et la séquence des manœuvres de levage, les mesures de supervision et de contrôle de l’application de la procédure et les mesures en cas d’urgence. Il faut également prévoir toutes les autres mesures jugées nécessaires au bon déroulement des travaux.