Lésions à l’épaule : l’influence de l’évaluation et du traitement sur le retour au travail

Par Suzanne Blanchet

3 février 2016

Les coûts qu’occasionnent annuellement les lésions aux épaules acceptées par la CNESST ont atteint près de 400 millions de dollars, de 2005 à 2007 seulement. Cette donnée comprend les coûts humains et ceux qui découlent de la perte de productivité.

Constatant l’ampleur du problème, l’IRSST a fait un appel de propositions, en collaboration avec le Réseau provincial de recherche en adaptation-réadaptation, afin qu’une étude soit menée dans le but de dresser un bilan des connaissances sur l’évaluation et le traitement des travailleurs atteints de telles lésions, espérant ainsi favoriser un retour optimal au travail.

Le fruit de cette recherche, le rapport intitulé L’évaluation clinique, les traitements et le retour en emploi de travailleurs souffrant d’atteintes de la coiffe des rotateurs, intéressera d’abord ceux qui traitent les personnes atteintes : médecins de famille et du sport, physiatres, radiologistes, orthopédistes et professionnels de la réadaptation. Les employeurs et les travailleurs qui veulent mieux comprendre la problématique des lésions à l’épaule y trouveront également des renseignements très intéressants.

Qu’est-ce qu’une atteinte à la coiffe des rotateurs ?

La coiffe des rotateurs est composée de quatre muscles et tendons qui partent de l’omoplate et passent dans un canal très étroit, entre l’acromion et la tête de l’humérus. Lorsqu’une personne travaille les bras tendus, les tendons des muscles de la coiffe des rotateurs, essentiels à la mobilité et à la stabilité de l’épaule, peuvent se trouver pincés sous l’acromion, ce qui cause alors inflammation et douleur. Plus rarement, une chute peut mener à une déchirure de ces tendons.

L’atteinte à la coiffe des rotateurs fait précisément l’objet des travaux de Jean-Sébastien Roy, chercheur au Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale et professeur agrégé au Département de réadaptation de l’Université Laval, à Québec. Il était donc le candidat tout désigné pour produire le bilan des connaissances attendu par l’IRSST.

Des résultats probants

Le chercheur a formé une équipe composée de collaborateurs de diverses spécialités, notamment la réadaptation, l’imagerie, la médecine du sport et la physiatrie. « J’avais besoin de ces cliniciens dans mon équipe pour que les résultats de nos travaux de recherche soient crédibles aux yeux de leurs pairs, explique Jean-Sébastien Roy. Ils nous ont aidés à comprendre certains éléments de la littérature. »

Ces travaux consistaient à faire une revue systématique de la documentation existante sur les atteintes à la coiffe des rotateurs. Une méta-analyse était ensuite effectuée lorsque les données s’y prêtaient, un exercice qui consiste à compiler les données d’études dont la méthode est homogène, puis à effectuer une nouvelle analyse statistique. Le nombre de sujets d’une métaanalyse étant plus élevé, les résultats sont d’autant plus probants.

Le rapport qui découle de cette recherche porte sur trois grands thèmes : l’efficacité des outils diagnostics et d’évaluation clinique, l’efficacité des traitements couramment utilisés et le retour au travail. Les conclusions se trouvent à la fin de chaque section du bilan, si bien qu’un lecteur pourrait choisir de ne lire que celles qui concernent son domaine d’expertise, quoique la lecture de toutes les conclusions permette d’avoir une vue d’ensemble de la problématique. Le chercheur espère être en mesure de publier prochainement un guide pratique à l’intention des cliniciens.

L’évaluation clinique et diagnostique

« Les cliniciens aimeraient pouvoir s’appuyer sur un test clinique unique qui leur confirmerait l’atteinte à la coiffe desrotateurs ; malheureusement, ce test n’existe pas, déplore Jean-Sébastien Roy. Pour établir un bon diagnostic, il faut combiner différents tests physiques avec l’historique du patient. »

L’imagerie n’est-elle pas le moyen le plus rapide pour établir un diagnostic ? « À la lumière de nos travaux, nous recommandons de faire d’abord une première évaluation clinique à l’aide de tests physiques afin d’établir le diagnostic et de traiter en conséquence. L’imagerie ne devrait venir qu’en second lieu, si les symptômes persistent. »

Trois modes d’imagerie sont alors possibles : l’échographie, la résonance magnétique et l’arthrographie par résonance magnétique. « Ce que nous avons observé dans les études, c’est que l’échographie est d’aussi bonne qualité diagnostique que les deux autres modes, soutient Jean- Sébastien Roy. Comme elle coûte beaucoup moins cher, nous recommandons l’échographie en premier lieu. »

L’efficacité des traitements

L’atteinte à la coiffe des rotateurs peut prendre deux formes : la tendinopathie et la rupture.

La tendinopathie est la dégénérescence du tendon. Selon les évidences actuelles, la première étape du traitement devrait être la réadaptation. « Les interventions les plus efficaces à court, à moyen et à long termes, ce sont les exercices, estime le chercheur. Donc, renforcement, contrôle du mouvement et amélioration de la flexibilité de l’épaule. Les anti-inflammatoires peuvent avoir un effet à court terme et les infiltrations ne donnent rien de plus que les anti-inflammatoires, tout en étant plus invasives. La chirurgie ne devrait être envisagée qu’en cas d’échec du traitement conservateur. »

Si le tendon est déchiré, on peut parler de rupture partielle ou complète, aussi appelée transfixiante, de la coiffe des rotateurs, soit une rupture de part en part. « Selon les meilleures données probantes, la chirurgie est alors efficace, que ce soit par voie ouverte ou par arthroscopie. » Jean-Sébastien Roy note toutefois que des études laissent entendre qu’un programme d’exercices pourrait aussi être efficace en cas de rupture : « Actuellement, les évidences ne sont pas aussi fortes qu’avec la chirurgie, mais des exercices appropriés pourraient être recommandés à une personne qui refuserait de  se faire opérer. »

Le retour au travail

Un travailleur dans la cinquantaine ou un plus jeune dont les tâches exigent qu’il travaille les bras en élévation aura-t-il de la difficulté à retourner au travail ? « Sans consensus, rien ne permet de prédire la durée de l’absence et le retour au travail avec ou sans limitations fonctionnelles après avoir subi une atteinte à la coiffe des rotateurs. Comme nous n’avions pas de données probantes pour cette section, nous avons étendu nos recommandations aux atteintes musculosquelettiques de façon générale, en insistant sur l’importance de la communication et du rôle de l’employeur dans le processus de retour au travail. »

Pour en savoir plus

ROY, Jean-Sébastien, François DESMEULES, Pierre FRÉMONT, Clermont E. DIONNE, Joy C. MACDERMID. L’évaluation clinique, les traitements et le retour en emploi de travailleurs souffrant d’atteintes de la coiffe des rotateurs, Rapport R-885,132 pages.

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