L’identification et l’analyse des risques
Au cœur de la prévention
Par Paul Therrien
28 novembre 2023
Photo : TippaPatt/Shutterstock.com
Vous désirez organiser la prévention dans votre milieu de travail, mais vous vous demandez par où commencer? Lors du Grand Rendez-vous de la CNESST, Natalie Saindon, conseillère en gestion de la prévention à l’Association sectorielle paritaire MultiPrévention, et Jean-Philippe Lamonde, coordonnateur en prévention à l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur Administration provinciale (APSSAP), ont répondu à cette question. Voici ce qu’ils avaient à dire.
Selon les conférenciers, l’identification et l’analyse des risques soutiennent les organisations dans leur prise en charge de la santé et de la sécurité du travail (SST), donnent l’occasion aux employeurs de prouver la diligence raisonnable en cas d’accident grave et permettent à la CNESST d’assurer le respect des obligations en lien avec la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST). Cette démarche de prévention permet également de prioriser les risques et de déterminer comment investir les ressources requises. Enfin, elle a le mérite d’être très proactive : au lieu de réagir à la suite d’événements indésirables, elle permet de réduire considérablement la probabilité qu’ils se produisent. Ce travail en amont est très pertinent dans une optique de gestion et de prévention des risques, affirment Mme Saindon et M. Lamonde.
POUR COMMENCER
Bien sûr, il est possible que le comité de santé et de sécurité de l’organisation (CSS) ait une longue liste de risques à éliminer ou à contrôler, et la tâche peut sembler insurmontable. Voici donc comment procéder à une gestion proactive, selon les conférenciers.
Tout d’abord, il faut former un CSS, idéalement composé de représentants de l’employeur et de représentants des travailleurs; il aura notamment comme objectif d’identifier et d’analyser les risques. Mme Saindon et M. Lamonde suggèrent que quatre à six personnes représentant différents secteurs de l’établissement siègent à ce comité. Selon eux, les rencontres devraient durer de deux à trois heures et avoir lieu chaque semaine ou chaque mois. La présence d’un conseiller-expert objectif et neutre est une valeur ajoutée.
IDENTIFIER ET ANALYSER
Les conférenciers expliquent que, lorsqu’on parle de danger, on évoque ce qui peut causer un dommage. Le risque, quant à lui, fait référence à la probabilité d’effets nocifs liés à l’exposition au danger. Par exemple, un piéton qui traverse une route s’expose au danger de se faire frapper par un véhicule. Le risque associé à cette action dépend du type de route traversée. En effet, une route de campagne, avec peu de circulation, représente un risque faible, alors qu’une autoroute en milieu urbain comporte un risque très élevé.
Il est par ailleurs important de s’assurer que tous les membres du CSS chargés d’identifier et d’analyser les risques possèdent la formation et l’expertise nécessaires pour effectuer ces tâches, qu’ils aient à cœur la SST et qu’ils soient pleinement motivés à mener les travaux requis. Il faut savoir que des formations sur les CSS sont offertes par différentes associations sectorielles paritaires, à distance ou en présentiel.
LES OUTILS À DÉVELOPPER
Il existe plusieurs méthodes pour procéder à l’identification et à l’analyse des risques. Selon les conférenciers, l’analyse des risques consiste généralement à évaluer leur gravité et la probabilité qu’ils se concrétisent. Prenons, par exemple, l’analyse du risque associé au fait de remplacer un néon au plafond : si une chute se produit, quelle est la gravité potentielle, sur une échelle de 1 à 4, de la blessure ou du dommage en résultant? On « multiplie » la cote attribuée par la probabilité (d’improbable à très probable, sur une échelle de 1 à 5, par exemple) que survienne une blessure ou un dommage lors de la réalisation de cette tâche. En utilisant un tableau exposant les risques (de « très élevés » à « très faibles »), on peut visualiser et clarifier les actions prioritaires. Les risques élevés sont ceux pour lesquels des actions immédiates doivent être prises. À l’opposé, les risques faibles peuvent être gérés sur un plus long délai. Il importe toutefois de préciser qu’il s’agit là d’une méthode d’analyse des risques parmi d’autres pouvant être utilisées.
Par ailleurs, un consensus doit être atteint dans le CSS en ce qui a trait à la place qu’occupe chacun des risques dans la grille d’analyse. Cependant, il ne faut pas stagner si on n’obtient pas de consensus pour un risque particulier; on peut progresser dans la démarche et régler les points de discorde plus tard.
LES PRINCIPALES ÉTAPES DU PROCESSUS
Tout d’abord, il est important d’expliquer la nature de l’identification et de l’analyse des risques à toutes les personnes concernées afin de s’assurer d’un engagement sérieux de leur part. Selon les conférenciers, on doit établir une liste des risques présents dans le milieu. Une première étape peut être de poser des questions aux travailleuses et travailleurs sur le terrain et noter les accidents du travail et les maladies professionnelles qui se sont produits, les « passé proche » ainsi que les plaintes formulées.
Il faut savoir qu’en multipliant les méthodes d’identification des risques, on s’assure de ratisser le plus large possible. On gagne également à classer les risques selon la catégorie à laquelle ils appartiennent : chimiques, biologiques, physiques, ergonomiques, psychosociaux et liés à la sécurité.
LES CONDITIONS DU SUCCÈS
Les conférenciers précisent que les membres du comité doivent disposer du temps et des ressources nécessaires pour bien remplir leur mandat et suggérer des mesures de prévention pertinentes, notamment. Par la suite, un plan, avec des échéances claires pour chacune des étapes, sera élaboré. Enfin, le comité doit s’assurer de poser des gestes concrets pour contrôler les risques et permettre leur prise en charge, en plus d’assurer un suivi. À noter : il est essentiel de conserver toute la documentation produite en lien avec les analyses de risques. On pourra ainsi la mettre à jour périodiquement et effectuer l’identification et l’analyse des risques en continu, concluent Mme Saindon et M. Lamonde.
DES RESSOURCES ESSENTIELLES
Les associations sectorielles paritaires (ASP) ont l’expertise et les ressources pour appuyer les démarches d’identification et d’analyse des risques. Par ailleurs, le site Web de la CNESST propose de très bons outils, simples et faciles à utiliser, à ce sujet :