Épicondylose latérale du coude : les traitements sont-ils tous équivalents?

Par Karolane Landry

9 novembre 2021

L’épicondylose latérale du coude, communément appelée épicondylite, ou tennis elbow en anglais, est un syndrome douloureux incapacitant que favorise une surutilisation du poignet et de l’avant-bras. Bien qu’il s’agisse d’une pathologie particulièrement fréquente chez les travailleurs, les traitements offerts sont limités. Les médecins généralistes du Québec ne proposent aucune ligne directrice standardisée.

C’est pourquoi, grâce à du financement de l’IRSST, que le Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a mené un essai clinique randomisé qui permet de comparer l’efficacité technique de deux traitements : la chirurgie par approche ouverte (CAO) et la fenestration échoguidée (FEG). Il s’agit de la première étude de ce genre dans le monde.

Selon les plus récentes statistiques de la CNESST, de 2015 à 2018, l’épicondylose latérale du coude (avec l’épitrochléite) se situe au troisième rang des demandes d’indemnisations acceptées liées à des troubles musculosquelettiques. Cette condition est principalement répandue chez les travailleurs qui exercent un métier les obligeant à refaire chaque jour les mêmes mouvements répétitifs. « Cela touche davantage ceux qui ont un travail de manutention, un travail d’ordinateur, mais aussi beaucoup de gens dans le domaine de la santé, comme les infirmières et les préposés aux bénéficiaires », explique Nathalie Bureau, médecin-radiologue et chercheuse- investigatrice au CHUM.

À la recherche d’un processus standardisé

Étonnamment, même s’il s’agit d’une pathologie très fréquente, il n’y a pas encore de traitement défini », rappelle Nathalie Bureau. Plusieurs thérapies sont actuellement offertes au Québec : arrêt des activités aggravantes au travail ou à la maison durant une période déterminée, traitements de physiothérapie, port d’orthèses, injections de plasma riche en plaquettes (très populaires aux États-Unis) et de cortisone pour soulager les douleurs. Cette dernière est très utilisée à cette fin, bien que la littérature soit claire : les injections de cortisone n’ont aucun effet sur la guérison. « Ce qui arrive, c’est que les patients sont soulagés et ne ressentent plus la douleur. Ils continuent donc à faire leurs activités, aggravent la lésion tendineuse et reviennent avec des limitations fonctionnelles plus marquées », souligne la chercheuse. La communauté médicale réclame donc un protocole précis.

Deux traitements sous la loupe

Avec cette étude, les chercheurs ont voulu évaluer l’efficacité thérapeutique de la FEG et de la CAO. D’une part, la première technique est minimalement invasive. Après une anesthésie locale, une aiguille est insérée dans le tendon pour y faire des microperforations guidées par échographie afin de créer un segment localisé. Pour sa part, la chirurgie nécessite une anesthésie et une incision cutanée pour couper une partie du tendon. « Je voulais comparer la fenestration au traitement que l’on considère ultime : la chirurgie. Quand les traitements conservateurs échouent, on peut proposer la chirurgie, et dans 70 à 80 % des cas, il y a une réponse très favorable », explique Nathalie Bureau.

Les participants ayant participé à l’essai clinique randomisé souffraient d’une épicondylose latérale chronique réfractaire à au moins six mois de traitements médicaux multiples. Il s’agissait de 64 travailleurs âgés de 48 ans en moyenne, séparés en deux groupes distincts, que les chercheurs ont suivis pendant 12 mois : 32 travailleurs ont reçu de la CAO et les 32 autres, de la FEG. La tâche de la majorité de ces patients impliquait de faire des flexions du poignet, des extensions du coude, des gestes répétitifs, des travaux physiques légers ou lourds, ou encore d’utiliser un clavier ou une souris d’ordinateur. Les participants ont été soumis à différents tests et ont répondu à des questionnaires médicaux, répétés après 6 semaines, 3 mois, 6 mois et 12 mois, pour permettre aux chercheurs d’analyser leur progression.

La feg : une technique à considérer

Divers indicateurs ont permis de déterminer que les deux techniques obtiennent un taux de succès comparable. « 80 % des patients étaient nettement ou complètement améliorés à six mois dans les deux cas. Ils ont continué de s’améliorer jusqu’à 12 mois de façon similaire », illustre Nathalie Bureau.

Le pointage obtenu à la principale variable analysée, la Patient Rated Tennis Elbow Evaluation (PRTEE), un questionnaire spécifique à la pathologie du coude, a révélé que les patients des deux groupes ont évolué de façon semblable. Six mois après l’intervention, ils ont remarqué une diminution significative de la douleur et une amélioration de leur capacité fonctionnelle. La force de préhension, la seconde variable, fut calculée à l’aide d’un dynamomètre. « On demande aux patients de serrer la main sur l’objet et on mesure la pression qu’ils peuvent générer avec la main atteinte et avec celle qui n’est pas atteinte », indique Nathalie Bureau. La force de préhension des participants des deux groupes est passée de 50 % à 80 %. L’étude a aussi dévoilé que la FEG permet un retour au travail plus rapide, la convalescence étant moins longue que celle d’une chirurgie, qui nécessite la guérison d’une plaie cutanée et la cicatrisation du tendon. Le troisième paramètre consistait à pratiquer une échographie pour mesurer l’épaisseur, l’aspect et l’élasticité du tendon avant et après le traitement, révélant des différences significatives de son effet.

Globalement, les patients se sont dits satisfaits des procédures dans les deux cas. Cependant, à la marque des six semaines et des trois mois, ceux qui ont subi la chirurgie ont constaté une détérioration de leurs capacités au travail, alors que l’état de ceux qui avaient eu recours à la FEG s’améliorait. « On peut donc penser que les coûts directs sur les milieux de travail pourraient être diminués avec la FEG : les patients peuvent retourner plus rapidement au travail », suppose Nathalie Bureau. Les résultats sont donc positifs : la fenestration échoguidée serait favorable dans un traitement, avant même le recours à la chirurgie.

Dans une prochaine étude, Nathalie Bureau aimerait comparer la technique de fenestration échoguidée simple à celle qui inclut l’injection de plasma riche en plaquettes. Cette dernière, qui nécessite une plus grande préparation médicale, produit-elle vraiment de meilleurs résultats, ou est-elle victime de sa popularité? C’est la question à laquelle la chercheuse aimerait répondre au cours des prochaines années.

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